L’augmentation de l’espace urbain entraîne une artificialisation des sols occupés par des infrastructures humaines. On entend par artificialisation des sols, le fait de transformer un sol naturel par des opérations d’aménagement qui entraîne une imperméabilisation partielle ou totale, ceci pour des fonctions urbaines ou de transport. La comptabilité des surfaces artificialisées, c’est-à-dire les terres qui supportent des activités humaines autres que l’agriculture et la sylviculture, propose des chiffrages variés d’une étude à l’autre. Mais aujourd’hui près de 10 % du territoire français métropolitain est artificialisé, soit environ 5 millions d’hectares, contre 8 % en 2010 et 7 % en 1990. Au final, tous les 5 à 10 ans, l’équivalent d’un département français est artificialisé.
Les cours d’école présentent depuis des décennies des surfaces bétonnées ou bituminées importantes et sont donc des candidates avec un fort potentiel de désimperméabilisation. Elles peuvent devenir des endroits ombragés et tempérés par de nouveaux aménagements tels des espaces végétalisés, qui apportent de la fraîcheur et une qualité de vie améliorée, voire un changement des habitudes au sein des cours de récréation. Les projets de désimperméabilisation peuvent devenir un outil pédagogique pour les enfants, l’occasion de leur enseigner le cycle de l’eau et de leur faire prendre conscience de son importance. Cependant, au-delà de cet aspect pédagogique déjà adopté dans quelques écoles (Marseille, Montpellier, Tours, Paris, Lyon…) faire de nouveau entrer la nature au cœur de l’école offre d’autres bénéfices.
Les bénéfices de la désimperméabilisation
Limiter les îlots de chaleur urbains, favoriser les îlots de fraîcheur
La densification des bâtiments et des aménagements fait accroître la température des villes lors de fortes chaleurs, c’est ce que l’on appelle l’effet d’îlots de chaleur urbain (ICU). Les fortes chaleurs estivales en ville constituent des situations d’inconfort pour les citadins, voire avoir des conséquences sanitaires fortes lors de canicules.
La tendance passée a été de supprimer les arbres des cours d’école pour limiter la gestion des feuilles mortes. Il en résulte que les cours d’école ne sont plus ombragées et certaines peuvent devenir de véritables fournaises, avec des températures dépassant les 50°C.
Ramener la nature dans l’enceinte de l’école participe à la lutte contre les îlots de chaleur. En effet, la perméabilisation du sol, autrement dit le retrait du matériau imperméable tel que le béton ou l’asphalte, permet la plantation de nombreuses plantes et arbustes. Cette couverture végétale, par l’évapotranspiration et l’ombre quelle génère, contribue à réduire les températures estivales au sein des villes. Les effets délétères des canicules (de plus en plus présentes) et l’installation de climatiseurs (forts pourvoyeurs de gaz à effet de serre) est ainsi limitée. Même si, il faut bien le dire, ils sont assez rares dans les édifices scolaires.
Dans les écoles, l’une des solutions est de proposer des densités végétales suffisantes pour répondre aux problématiques climatiques, en veillant toutefois à préserver la lumière à proximité des bâtiments. Les espaces doivent être adaptés aux enfants en termes de matériaux, mobiliers et végétaux afin d’éviter les intoxications, les blessures, etc. Les différentes zones doivent également avoir été étudiées au préalable afin de ne pas gêner la surveillance des enfants : éviter notamment les « angles morts », non visibles depuis les points de surveillance définis par les personnels enseignants et périscolaires.
Une meilleure gestion de l’eau pour favoriser la biodiversité
Afin de permettre l’infiltration des eaux de pluie dans le sol, il est nécessaire de concevoir un espace sobre respectueux de l’environnement (gestion raisonnée des espaces verts, végétaux adaptés au climat local avec un entretien limité). Il est souhaitable d’ajouter des dispositifs d’infiltrations complémentaires afin de faciliter l’absorption de l’eau dans le sol (puisard, tranchée drainante, etc.) tout en restant cohérent avec les besoins et les contraintes du milieu scolaire. Le renvoi des eaux pluviales en milieu naturel évite aussi le transport et la dépollution couteuse dans les stations d’épuration.
Les nouveaux espaces doivent également intégrer la récupération et la réutilisation des eaux pluviales afin de limiter l’utilisation de l’eau potable pour le nettoyage et l’arrosage. Les ouvrages de gestion des eaux de pluie en surface sont conçus à ciel ouvert et dans un souci d’intégration paysagère. Associés aux zones remises en pleine terre, ils deviennent un cadre de vie favorable pour le développement de la biodiversité, et par extension aux projets pédagogiques d’observation.
Qu’en est-il de la séquestration carbone ?
Les terres vivantes ont un pouvoir de séquestration carbone beaucoup plus importante que les terres recouvertes de bitume. La libération des sols et le développement d’un couvert végétal (sans utilisation de produits phytosanitaires) permettent de créer des puits de carbone.
Concrètement comment faire ?
Une visite de l’école, associée à une analyse de photo aérienne permet d’appréhender l’état actuel de la cour d’école (type de revêtements, présences d’arbres…) et d’estimer les surfaces qui peuvent être potentiellement désimperméabilisées. Cette visite est également l’occasion d’observer les techniques de gestion des eaux pluviales existantes à l’école (collecte vers le réseau d’assainissement, absence de gestion…). Il est nécessaire également de travailler avec les services techniques de la ville dont la connaissance du fonctionnement de la gestion de l’eau sur l’école est à recouper avec les données collectées.
L’étude du contexte hydrogéologique permet d’identifier la nature des sols au droit du site de l’école et identifier les nappes d’eau souterraines potentielles.
La définition des surfaces à désimperméabiliser et des mesures de gestion des eaux pluviales à prendre a minima pour respecter la réglementation, permettent de proposer des pistes afin de conseiller des gestions alternatives de l’eau. Par ailleurs, ce thème rejoint les appels à projets des Agences de l’Eau pour promouvoir les économies d’eau ; elles subventionnent les projets de désimperméabilisation et de végétalisation pour gérer les eaux de pluie en milieu scolaire en intégrant un volet pédagogique sur le cycle de l’eau. Un tel projet peut faire l’objet d’une labélisation bas carbone[1].
[1] Créé par le ministère de la Transition écologique et solidaire avec la collaboration de nombreux partenaires, le label bas-carbone a pour objectif de contribuer à l’atteinte des objectifs climatiques de la France (www.ecologie.gouv.fr/label-bas-carbone).
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