Etouffer de chaleur en ville l’été, nous sommes nombreux à être victimes de ce phénomène sans réellement savoir le nommer. Pourtant, l’îlot de chaleur urbain est un terme de plus en plus employé depuis une vingtaine d’années. Et pour cause, le réchauffement climatique accentue fortement l’incidence des épisodes caniculaires qui seront à l’avenir de plus en plus nombreux. Mais il est encore parfois difficile d’entrevoir véritablement ce qu’est un îlot de chaleur urbain. Qu’est-ce qui génère ce phénomène et comment se manifeste-t-il ?
De plus en plus, les villes combattent ou tentent d’anticiper ces points de surchauffes urbaines, car il ne s’agit pas seulement de lutter contre l’inconfort des usagers au quotidien. Pour contrer ce phénomène, de nombreux moyens se développent : la stratégie d’aménagement, la nature des matériaux employés, la couleur des revêtements, et aussi la végétalisation. Et d’ailleurs, c’est plus spécifiquement sur ce dernier point que nous allons nous attarder. La végétalisation des zones urbaines est véritablement devenue un enjeu de santé publique. Les collectivités œuvrent davantage pour trouver des moyens de rafraichir les villes à la fois sur des zones existantes mais également sur des quartiers en devenir.
Qu’est-ce qu’un îlot de chaleur urbain ?
L’îlot de chaleur urbain est un terme pour désigner le dôme d’air chaud présent sur les zones urbaines. A titre d’exemple, l’îlot de chaleur urbain de l’agglomération de Paris se concentre sur plus de 100 km2. Par ailleurs, on constate au sein d’une ville de multiples points de surchauffe très localisés, qualifiés alors d’îlots de chaleur (au pluriel).
Si le jour les villes sont légèrement plus chaudes que les campagnes avoisinantes, c’est la nuit que l’écart de températures est le plus significatif et pose le plus de problème, avec parfois jusqu’à 10 degrés de différence. Pendant la nuit d’été, les campagnes perdent la chaleur reçue pendant la journée et sont fraîches au petit matin. En ville, le phénomène est tout autre, la chaleur accumulée pendant la journée n’est pas ou peu dissipée pendant la nuit. L’épisode de canicule de 2003 illustre bien cet exemple. Pendant cette période, la zone d’agglomération parisienne enregistrait des températures nocturnes de 5 à 10 °C plus élevées que dans la campagne environnante. Or c’est précisément la nuit que les personnes sensibles sont les plus vulnérables.
Bien comprendre le phénomène pour mieux le combattre
Nous savons que la majeure partie de la chaleur reçue par une ville vient du rayonnement solaire. Mais c’est en fait un ensemble de facteurs qui provoque les îlots de chaleur urbain et qui génère ces élévations de températures en ville :
- Les matériaux utilisés : l’asphalte par exemple, particulièrement absorbante et de couleur foncée retient la chaleur accumulée et la restitue.
- Les revêtements des sols, peu ou pas perméables à l’eau, ne contribuent pas au rafraichissement de l’air ambiant par évaporation de l’eau du sol.
- L’absence de végétation est synonyme de moins d’ombrage et de moins d’évapotranspiration.
- Les morphologies des villes limitent la circulation des vents et des courants d’air, empêchant de fait la chaleur de se dissiper.
- La densité de la population, car dans une moindre mesure, l’activité humaine joue également un rôle aggravant. La concentration d’automobiles mais aussi l’utilisation des climatiseurs constituent un apport de chaleur interne. En effet, les climatiseurs rafraîchissent les maisons mais restituent la chaleur à l’extérieur et engendrent des points de surchauffe locale.
La végétalisation comme oasis de fraîcheur
L’introduction de végétaux en milieu urbain contribue véritablement à rafraîchir l’air ambiant des milieux urbains. Cela tient principalement en 3 points. D’une part, les arbres participent à l’interception des rayons solaires en développant une masse végétale importante essentielle à l’apport d’ombre.
D’autre part, sous l’effet de la chaleur, les espaces verts mais aussi les différents points d’eau des villes tels que les lacs, fontaines ou encore les grands jets d’eau voient leur eau s’évaporer. Parallèlement, les végétaux, notamment les arbres, transpirent par leurs feuilles afin de réguler leur température. Ces deux mécanismes couplés s’appellent l’évapotranspiration.
Par ailleurs, les espaces verts tels que les massifs, les pelouses participent à l’amélioration de la gestion des eaux pluviales. L’eau de pluie est infiltrée dans les espaces verts et une partie de cette eau est récupérée par la végétation. Les arbres œuvrent aussi à l’amélioration de la qualité de l’air : les végétaux permettent de fixer certaines particules fines très présentes dans les milieux urbains.
Les solutions à apporter
Repenser les villes et les quartiers
Les collectivités locales, par leur service sanitaire et social ou par les services en charge de la transition écologique, peuvent être amenées à s’orienter vers un bureau d’études environnement comme BURGEAP et à diligenter des études de repérage de population vulnérable en cartographiant les îlots de chaleur urbain via les images satellite mais également à l’aide de sondes de température, principalement en période estivale. Le croisement de la carte des températures et de la carte des populations sensibles (y compris les hôpitaux, les crèches, les EPAD) amènera à déterminer au mieux les lieux à végétaliser en priorité pour disséminer des îlots de fraicheur, véritables refuges pour la population en cas de canicule.
Les aménageurs peuvent être amenés à démontrer que les projets n’aggravent pas l’îlot de chaleur urbain pour obtenir des permis d’aménagement. Ils mandateront alors un bureau d’études environnement pour la réalisation d’une étude d’impact avant, pendant et après la construction du projet. Cette étude a pour but de déterminer que ces constructions n’intensifient pas l’effet de chaleur urbain.
* Températures issues du guide « Aménager avec la nature en ville » publié par l’ADEME.
L’importance du choix des végétaux
Les projets de végétalisation s’inscrivent dans la durée puisqu’il s’agit dans un premier temps d’offrir des oasis de fraicheur à la population mais également de faire durablement baisser la température de la ville. La végétation contribue à l’adaptation au changement climatique et permet d’atténuer l’effet d’ilot de chaleur urbain.
Mais si la végétalisation joue un rôle de climatiseur évident, il ne suffit pas d’implanter n’importe quels végétaux ni même d’éluder la question de l’entretien. C’est en effet une question de bon sens, il est important de choisir des espèces adaptées au milieu urbain qui se montreront résistantes en cas de canicule. Le choix des essences sera déterminé en prenant en compte ces critères.
Les essences d’arbres et de plantes sont déterminées en fonction de leur adaptation aux fortes chaleurs et à la disponibilité de l’eau et aux conditions climatiques parfois dures. Par ailleurs, ce choix peut également être fonction de l’entretien, de la place et des arrosages qu’ils génèreront, coûts supplémentaires pour les collectivités. Pendant longtemps le milieu urbain dépourvu de végétaux a été plébiscité aux dépens du monde rural. Mais remettons un peu de vert dans nos villes pour plus de fraîcheur dans notre quotidien. Il semble finalement que Brassens avait raison lorsqu’il chantait déjà il y a 60 ans : « auprès de mon arbre, je vivais heureux, j’aurais jamais dû m’éloigner de mon arbre… ». Il y a véritablement de beaux chantiers à concevoir et à réussir pour des villes adaptées au climat futur.
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